Cette bannière est composée de trois lés de damas en soie écrue, cousus verticalement. Peinte sur les deux faces d’un même motif en miroir, elle présente en son centre une roue de moulin dorée, symbole de Mulhouse, cerclée de noir. Dans l’angle supérieur, figure Saint Étienne, auréolé, debout sur un terrain rocheux, vêtu d’une dalmatique et portant une palme ainsi qu’un livre de pierres. Un cadre de branchages orne le pourtour de la pièce.
Ce drapeau prend tout son sens dans le contexte du début du XVIe siècle. À cette époque, la Sainte Ligue, formée à l’initiative du pape Jules II, rassemblait les forces du Saint-Siège, les Espagnols, les Vénitiens, les cantons suisses et le roi d’Angleterre, unis contre les troupes du roi de France Louis XII. Alliée des Suisses depuis 1506, Mulhouse s’engage dans le conflit et envoie un contingent conduit par le capitaine Martin Brustlein, qui se distingue particulièrement lors de la prise de Pavie en 1512.
En reconnaissance des services rendus, le pape accorde aux combattants une bannière. Les alliés suisses ayant reçu la leur, Mulhouse, qui n’avait pas combattu sous son propre drapeau, se retrouve oubliée. Selon l’historien Robert Durrer, la cité dépêche alors un ambassadeur à Rome, Jean-Oswald de Gamshars, greffier-syndic, chargé de plusieurs requêtes.
Les Mulhousiens obtiennent non seulement le droit d’orner leur bannière de l’image de Saint Étienne, patron de l’église principale, mais aussi l’autorisation de modifier les couleurs des armoiries de la ville : remplacer la roue rouge (« de gueules ») par une roue dorée sur fond argenté. Ils reçoivent également le privilège d’absoudre l’« antico morso », c’est-à-dire tous ceux ayant combattu sous cette nouvelle bannière.
La bulle papale correspondante est toujours conservée aux archives municipales de Mulhouse. Après la Réforme, la bannière retrouve ses couleurs traditionnelles, mais l’alliance avec les treize cantons suisses perdure jusqu’en 1798, date de la réunion de Mulhouse à la France.
Retrouvez cette œuvre à l’occasion de l’exposition Pépites au Musée des Beaux-Arts de Mulhouse.